Ce très chaud mois de juin 2019, nous nous en souviendrons... 44 degrés au thermomètre. Il en a fallu du courage à l'exposante et à ceux qui l'ont entourée pour accrocher la centaine d'aquarelles au sein de ce bâtiment du XIIe siècle. Un accrochage parfois sensible pour quelques grandes aquarelles qui allaient apporter pendant un mois leur douceur colorée aux restes du dernier prieur gisant au fond de la fosse!!!
Ainsi, quinze ans après sa première exposition, la talentueuse Jocelyne Chauveau, l'enfant du pays, est revenue sur ce lieu de Culture prestigieux du Berry, à deux pas de l'abbaye de Noirlac, accompagnée chaque jour par une nuée d'hirondelles et autres joyeux oiseaux venus prendre la fraîcheur dans le vieil édifice, avant d'aller tremper leurs pattes dans le Cher tout proche. Cet été, Jocelyne Chauveau nous a invités à découvrir des œuvres à la limite de l'abstraction, mais où la poésie est toujours présente. Pour en arriver à ce degré de perfection, elle a commencé à dessiner à cinq ans et ne s’arrêtera plus. Dans la nature, son sens de l'observation fait merveille. Après avoir fréquenté assidûment l’École d’art et des Arts appliqués de Saint-Amand-Montrond et poursuivi de brillantes études de latin-grec, elle entrera à la Sorbonne-Institut d’art à Paris, où elle obtiendra sa maîtrise d’histoire de l’art.
Patience et persévérance
La peinture à l’aquarelle la séduit depuis longtemps : « J’ai été attirée par la puissance suggestive de cette technique : espèce de concentré entre l’idée et le geste, entre le concept et la forme que je donne à celui-ci, avec un minimum de gestes sur le papier. Et puis, me dit-elle, quelle belle aventure que l’aquarelle lorsque je mélange avec harmonie l’eau et les pigments sur le papier. » A ma question de savoir quelles sont, selon elle, les qualités premières que doit avoir un peintre à l’aquarelle, sa réponse fuse : « C’est la patience et la persévérance que je place en premier parmi beaucoup d’autres, et notamment, la sûreté du coup de pinceau alliée à la prise rapide des décisions. » J’ai vu cette belle artiste, modeste et raffinée, dessinatrice hors pair, exécuter le 23 juin dernier, en démonstration publique, le portrait aquarellé d'une jeune fille de la région directement au pinceau, mouillé dans le mouillé, sans aucune préparation préalable, ce qui est rare. Sociétaire des Artistes français, en janvier 2007, et de la Fondation Taylor, elle vient d’obtenir, entre autres nombreuses distinctions, la médaille de Vermeil de la Ville de Paris. Elle expose aussi bien en France qu’à l’étranger depuis de nombreuses années.
Et elle conclut notre entretien en rappelant : « Le premier degré de la recherche, c’est la lumière; c’est elle qui construit les masses et détruit les contours des formes, c’est elle qui guide l’œil vers le point focal ou vers la sortie du tableau. La beauté ? Je sais voir d’instinct quand quelque chose est beau ou pas, mais je ne sais pas définir la beauté. La beauté est souvent quelque chose qui écrase. Je ne la cherche pas, si elle s’installe, tant mieux ; je ne la cherche pas, mais je me contrains à certaines règles de composition et d’harmonie, comme en musique. »
Puis elle se retourne d'une pirouette. Tout était dit... ou presque.
Pour le magazine Art'issime
Marc ALAVOINE