La première fois que j’ai touché la terre, c’était à l’âge de cinq ans, me dit-elle. Un puissant lien, indéfinissable, venait de se créer entre elle et moi. Bien plus tard, vers quinze-seize ans, je découvrirai que l’épouse du directeur de mon lycée était potière et qu'elle venait de créer un atelier au sein même de l'établissement. »
« A cette époque, je ne voulais plus étudier, je désirais devenir potière malgré l'opposition frontale de mes parents. » Cependant, ceux-ci, sensibles à ses aspirations de jeunesse, lui achetèrent un tour et un petit four, mais en lui faisant promettre d'achever ses études destinées à l’enseignement. Promesse tenue, puisque Monica Stüttgen devint professeur des écoles dans son pays. Plus tard, elle quittera le domicile de ses parents et connut un artisan potier près de Heidelberg avec qui elle se mariera. Une vie de bohème commence alors. Elle réalise ses premiers pots sur une île de la mer du Nord puis s'installe en France avec son mari aux Aix-d'Angillon, dans le Centre France, tout près de La Borne, la patrie des potiers. Concomitamment à son activité française de ses débuts, elle continuera son travail de production en Allemagne.
Poésie
Monica Stüttgen a poursuivi lentement, mais patiemment, un chemin souvent semé d’embûches, sans jamais abandonner ses rêves de potière. Les aléas de la vie ont guidé ses pas vers cette région de Rhénanie-Westphalie où elle demeure depuis vingt ans. « Mon oncle m’a beaucoup aidée à me reconstruire ici. Depuis le mois de janvier, je me sens libérée de ma charge d’enseignante. » En cette fin octobre 2019, elle nous parle avec passion de ce métier d’art qu’elle exerce avec talent. Son atelier de poterie*, dans lequel elle nous reçoit, est à son image. Ici, la poésie est omniprésente dans la plus grande partie de son domaine : d’abord, dans sa maison-atelier, où le visiteur curieux peut trouver, entre autres, toutes sortes d’objets familiers, ensuite, dans le pré entourant la maison. Là, on y rencontre un monde animal de ferme étonnant, mais aussi des personnages champêtres surprenants et hauts en couleur qui semblent sortis directement d’un four féerique. « Mes céramiques, précise-t-elle, sont fabriquées individuellement et uniquement à la main en plusieurs étapes, cuites à haute température et extrêmement durables, c’est-à-dire résistantes au lave-vaisselle, au micro-ondes et au gel. »
En cette avant-veille de fêtes, je quitte cette maison enchantée fleurant bon la féerie populaire des très anciens contes allemands qui firent rêver de nombreuses générations. « L’art doit-il être utile ou non ?» Éternelle question que se posent les artistes et pour laquelle je répondrai par l’affirmative. La fée Monica du Stevertal est passée par là.
Pour les Amis d'Art'issime :
Pierre-Émile GIRARDIN
* Töpferei Atelier Monica Stüttgen, Stevern 90, 48301 Nottuln. Tél. : 02502-226992
info@toepferei-atelier-s.de; www.toepferei-atelier-s.de